Dans l’article “Modern analytical supercritical fluid chromatography using columns packed with sub-2 µm particles : A tutorial” paru dans la revue Analytica Chimica Acta (824 (2014) 18-35), Lucie Nováková, Alexandre Grand-Guillaume Perrenoud, Isabelle Francois, Caroline West, Eric Lesellier et Davy Guillarme donnent une vue d’ensemble très intéressante des possibilités, limitations et conditions analytiques de la SFC moderne. Nous vous présentons ici un résumé de cet article complété par nos observations d’utilisateurs de cette technique.
La chromatographie par fluide supercritique longtemps utilisée pour quelques applications très spécifiques, comme la séparation d’énantiomères, est aujourd’hui revenue sur le devant de la scène grâce à l’arrivée d’une nouvelle génération d’instruments (nouvelle pompe BPR et UHPLC) et à une multitude de combinaisons possibles entre le solvant de dilution, les colonnes (type et géométrie), le co-solvant (type et pourcentage), la température, le débit, …
Les auteurs nous présentent deux systèmes appartenant à la nouvelle génération d’instrument SFC : l’ACQUITY UltraPerfromance Convergence Chromatography (UPC2) de Waters (2012) et le 1260 Infinity Hybrid SFC/UHPLC system d’Agilent Technologies (2010) qui sont aujourd’hui en compétition. Comme son nom l’indique le système d’Agilent est « hybride » et permet de basculer grâce à un système de valve de la SFC à l’UHPLC alors que l’instrument Waters est totalement dédié à la SFC. Les différences notables entre le système Waters et celui d’Agilent sont la pression et le débit maximal respectivement de 413 bar et 4 mL/min et de 600 bar et 5 mL/min, la pression maximale nous semble être un facteur à améliorer sur les prochaines générations d’instruments.
Les auteurs nous rappellent que l’utilisation du CO2 comme phase mobile peut présenter des difficultés d’élution pour les composés polaires et de haut poids moléculaire. Afin d’augmenter le pouvoir solvant de la phase mobile et de favoriser la solubilité de ces composés, plusieurs co-solvants peuvent être utilisés. Le méthanol est le co-solvant le plus courant pour l’élution des composés polaires. Plus généralement les alcools (caractère donneur d’hydrogène) sont des co-solvants de première intention car ils permettent une grande efficacité sans trop dégrader la sélectivité.
Il est également possible d’ajouter au co-solvant des additifs qui permettent d’améliorer la finesse des pics et la sélectivité. Nous utilisons couramment au laboratoire le formiate d’ammonium qui, comme relevé dans l’article, reste le meilleur choix pour l’analyse de composés à la fois acides ou basiques. Pour les composés basiques, d’autres additifs volatiles comme l’acétate d’ammonium et le carbonate sont également utilisés.
Les auteurs attirent très justement l’attention sur l’importance du volume mort des systèmes dans le choix des géométries de colonnes et son incidence sur l’efficacité attendue. Le volume mort des systèmes SFC étant supérieur à celui des systèmes UHPLC, les colonnes de géométrie 100 x 3 mm, 1.7 µm sont celles qui apportent les meilleures performances chromatographiques.
Notre expérience sur ces systèmes confirme absolument cette observation.
Aux paramètres présentés ci dessus, il est possible d’en ajouter (en deuxième intention) quatre autres moins décrits dans la littérature: la température, la pression, le débit et l’eau comme additif dans la phase mobile. En effet, les auteurs nous précisent que, contrairement à la chromatographie liquide, l’augmentation de la température induit une plus forte rétention des composés en raison de la diminution de la densité de la phase mobile. Après avoir atteint un maximum, la rétention diminue à très haute température. L’influence de la température sur la rétention est assez complexe car elle dépend des conditions expérimentales, de la propriété des solutés, de la nature du fluide supercritique et du mélange CO2/co-solvants (viscosité). Cependant pour un mélange de phase mobile binaire typiquement CO2-méthanol une température de 40°C et une pression de 150 bar semble être un bon premier choix.
L’eau est très peu soluble dans le CO2 supercritique mais son utilisation en mélange avec le co-solvant est interessante. Elle permet d’élargir le domaine d’application de la SFC à la séparation de molécules très polaires.
Cet article très complet permet d’avoir toutes les clés en main pour obtenir assez simplement des performances chromatographiques de haut niveau sur les systèmes SFC. Les utilisateurs plus exigeants pourront aller encore plus loin en activant les quatre « nouveaux leviers » encore peu exploités et décris par les auteurs.
A partir de notre expérience sur un système SFC de nouvelle génération (UPC2 – Waters) nous pouvons confirmer que ces systèmes permettent une prise en main rapide et simple de l’instrument et, même pour les non initiés, d’acquérir des résultats exploitables. La SFC est aujourd’hui une méthode d’analyse qui permet des séparations rapides et efficaces d’une large gamme de composés. Il reste toutefois un large champ d’exploration pour d’autres types de molécules telles que les molécules polaires ou semi-polaires.